Carine Tardieu : « Mon attrait pour la Bretagne est à la fois artistique et logistique. »
3 février 2025
8 minutes de lecture
Pour la troisième fois, la réalisatrice Carine Tardieu revient en Bretagne. Son nouveau film, « L’Attachement », s’est tourné plusieurs semaines dans la ville de Rennes, en juillet et novembre 2023. Cette histoire émouvante de la rencontre de voisins de palier (Valeria Bruni-Tedeschi et Pio Marmaï) évoque avec finesse la famille que l’on se choisit et que l’on construit. Le film sort en salles le 19 février 2025.
Pourquoi revenir tourner en Bretagne et choisir la ville de Rennes ?
J’ai écrit cette histoire sans penser à une ville en particulier. Narrativement, j’avais besoin d’une ville moyenne à la fois suffisamment grande pour que les personnages soient anonymes et suffisamment petite pour qu’ils puissent naturellement se croiser par hasard dans une rue.
De plus, tourner en province crée une cohésion d’équipe, j’y tenais d’autant plus que nous avions des enfants sur le plateau et que le film évoque aussi le thème de la famille.
Avec mon premier assistant, Mathieu Vaillant, nous avons fait les repérages en voiture en Pays de la Loire et en Bretagne. Après avoir visité Angers et Nantes, nous avons eu un vrai coup de cœur pour Rennes. Son architecture est extrêmement variée, son centre-ville très vivant, il y a de nombreux parcs dont nous avions besoin pour les scènes avec les enfants. Cette ville, riche du point de vue du décor et de l’ambiance, a aussi un avantage logistique car elle est facilement accessible depuis Paris grâce au TGV.
D’un point de vue narratif, nous avions aussi besoin que nos personnages puissent se rendre dans une maison de bord de mer en moins de deux heures de trajet (la maison de la grand-mère jouée par Catherine Mouchet). Au final, nous avons choisi de tourner intégralement à Rennes, à l’exception de deux jours à Lancieux, un village qui représente Cancale.
Votre film a reçu l’aide financière de la Région Bretagne et a été accompagné par l’Accueil des tournages. Quel accueil avez-vous reçu ? Avec qui avez-vous travaillé ?
Mon attrait pour la Bretagne est vraiment à la fois artistique et logistique. Une partie des techniciens qui nous ont accompagnés étaient bretons, notamment la repéreuse, Solène Combemale, qui habite Rennes. Elle a trouvé le décor le plus important du film : cet immeuble où deux appartements se font face sur le même palier, à l’étage où habite Valeria Bruni-Tedeschi face à Pio Marmaï et sa famille. Cette découverte a emporté notre décision de tourner à Rennes. Cet immeuble est magnifique de l’intérieur comme de l’extérieur, avec ses portes vitrées et ses petits carreaux de verre. Notre équipe a investi le lieu pendant trois semaines et ses occupants ont été très accueillants. Ils nous ont même organisé des apéritifs sur le toit-terrasse ! A la fin, ils nous ont raconté que ce tournage avait recréé du lien dans l’immeuble… C’est drôle car c’est aussi le sujet du film, le lien entre les gens.
Le casting des rôles secondaires s’est également déroulé dans la Région ?
Effectivement, Clémentine Fritsch s’est occupée d’une partie des rôles secondaires, dont quelques-uns étaient bretons. Mais surtout, elle a réussi l’exploit de caster une trentaine de bébés… Le temps de tournage avec des bébés est limité et nous avions besoin de plusieurs enfants pour le rôle de Lucille, des nourrissons jusqu’à des petites filles de deux ans. Nous avons aussi été très bien accueillis par le personnel de la clinique mutualiste La Sagesse, à la maternité. Ils nous ont même donné des conseils pour nous occuper des bébés sur le tournage. C’est aussi à cet endroit que nous avons tourné la scène des urgences.
Vous militez depuis longtemps pour des tournages éco-responsables, est-ce que ce fut le cas pour l’Attachement ?
Tout à fait, j’ai voulu insuffler à toute mon équipe une dynamique écologique sur ce tournage. Je souhaitais vraiment que ce film soit le moins impactant possible du point de vue de l’empreinte carbone. On sait tous que le cinéma est catastrophique de ce point de vue mais toute l’équipe y a mis du sien et ça a plutôt bien marché. Rennes est une ville très bien desservie en termes de transports en commun, il y a des vélos en libre-service, on peut s’y déplacer facilement à pied. Par exemple, pendant les trois semaines de tournage dans l’immeuble, nous nous sommes organisés sans camion-régie. La cantine était basée dans une cour de lycée de l’autre côté de la rue, l’équipe habitait des locations proches plutôt que l’hôtel. On arrivait sur le plateau soit à pied, soit en transports en commun. Nous avons limité l’utilisation de voitures pour conduire certains comédiens sur le plateau et pour les deux jours de tournage en bord de mer.
Le Morbihan pour Otez-moi d’un doute en 2016, le Finistère pour Les Jeunes amants en 2020, Rennes pour L’Attachement. Comment expliquez-vous votre fidélité à cette Région ?
La Bretagne est un endroit où je me sens bien, j’ai l’impression d’être à chaque fois très bien accueillie. Et je ne dis pas ça par flagornerie. Pourtant, je n’ai pas d’origines bretonnes et ce n’est pas une région où j’ai passé mes vacances régulièrement enfant. Même si récemment j’ai retrouvé des films super 8 de moi petite à Belle-Île-en-Mer. Pendant le tournage de L’Attachement, je rentrais rarement à Paris pour le week-end, je faisais plutôt venir ma fille à Rennes. J’ai vraiment profité de la ville, j’y ai vécu de manière très agréable.
Auriez-vous envie de revenir une quatrième fois ?
Carrément. Plus sérieusement, je me concentre plutôt sur la sortie de L’Attachement et sur le nouveau scénario que j’écris. L’histoire se situe pour l’instant plutôt en Normandie qu’en Bretagne. Mais à ce stade, on n’est jamais sûr de rien. Ce qui est sûr et certain, c’est que je reviens en Bretagne avec joie à chaque fois.
Propos recueillis par Valérie Ganne.
Soutenu par Bretagne Cinéma, le film a reçu l’aide financière de la Région Bretagne en partenariat avec le CNC et l’accompagnement personnalisé de l’Accueil des tournages.
Partager :
